Quelles sont les expressions-clés les plus recherchées sur Google par les chefs d’entreprise ? C’est surtout l’absence de recherche qui peut surprendre. Retour sur des carences qui en disent long.
Comme toute personne qui décide un jour de publier du contenu destiné à un public spécifique, je me suis posé la question du référencement naturel de ce site. J’aimerais évidemment qu’un maximum de chefs d’entreprise tombent sur ces pages, y puisent de l’inspiration et y réagissent afin de les rendre toujours plus pertinentes.
Quand on veut optimiser son référencement naturel, l’une des premières choses à faire est de réfléchir aux mots clés que l’on souhaite travailler. J’ai évidemment en tête une liste de sujets sur lesquels je compte prendre la parole ici, que ces sujets intéressent 10 ou 100 personnes. Mais je souhaite le plus possible répondre aux attentes d’un maximum d’entrepreneurs.
La question devient alors : sur quels sujets les chefs d’entreprise font-ils des recherches Google ?
Gestion du temps, développement personnel : les requêtes génériques existent
Un très bon point de départ pour y répondre est de se pencher sur les requêtes les plus courantes sur Google, grâce à l’outil Google Keywords Planner. Il donne des indications sur le volume mensuel de recherches des différents mots clés et expressions que l’on vise.
Après quelques minutes de travail sur l’outil un phénomène assez frappant m’est apparu. Si effectivement les recherches génériques sur « comment gérer son temps« , « travailler de chez soi« , ou encore « équilibre vie personnelle / vie professionnelle » se comptent généralement en milliers de requêtes mensuelles, j’ai pu constater qu’elles ne sont jamais assorties du moindre ciblage « chef d’entreprise » ou « dirigeant« .
« Comment gérer son temps quand on est prof », « quand on est cadre », « quand on est étudiant », « quand on est enceinte », etc, toutes ces requêtes existent dans des proportions suffisantes pour être détectées par Google. Autrement dit Google confirme l’existence de milliers d’étudiants, cadres, profs ou femmes enceintes qui se posent des questions sur la gestion de leur temps.
« Travailler de chez soi quand on est cadre », par exemple, fait aussi l’objet d’une multitude de requêtes. Nombreux sont les cadres qui voient dans le télé-travail la clé d’une meilleure productivité, qui souhaitent mieux exploiter les outils de communication modernes ou négocier avec leur employeur quelques éléments supplémentaires d’un meilleur confort de vie… et le télé-travail, quand il est bien mené, coche effectivement toutes ces cases.
Mais « gérer son temps quand on est chef d’entreprise » ne fait pratiquement l’objet d’aucune requête. « Travailler de chez soi quand on est dirigeant » (ou ses variantes), idem. Pas plus que le « développement personnel du dirigeant« .
Evidemment, des pages existent sur tous ces sujets. Que l’on soit auteur de livres sur le développement personnel, un cabinet de conseil en management, une société de conseil en stratégie ou un coach en accompagnement du dirigeant : tous ces acteurs ont du contenu à proposer, des formations, du coaching, du consulting.
Mais ces expressions-clés ne semblent faire l’objet d’aucune requête spontanée, tout au moins pas dans des proportions que l’outil de Google prendrait la peine de signaler.
Pourquoi les chefs d’entreprise ne font-ils pas de requêtes spécifiques ?
Première hypothèse pour expliquer ce phénomène : les chefs d’entreprise se contenteraient-ils de requêtes génériques qui leur proposent des pages destinées à tous les types de situation sauf la leur ?
Les conseils sur la gestion du temps ou l’équilibre vie personnelle et vie professionnelle sur des sites qui partent du principe qu’on a les 35h et des RTT, correspondent sans doute à la réalité d’un salarié, mais pas à celle d’un dirigeant.
Se renseigner sur les gains de productivité liés au télé-travail alors qu’on est la patronne et qu’il ne tient qu’à soi d’agir sur les interruptions dans son entreprise, c’est aussi prendre le problème par le mauvais bout. A plus forte raison si l’on est soi-même victime d’interruptions à répétition, par exemple en conséquence de son micro-management (voir l’article sur Les ravages du micro-management).
Difficile de croire, par conséquent, que les chefs d’entreprise trouvent leur bonheur par des requêtes génériques sur ces sujets.
Autre hypothèse : rares sont les chefs d’entreprise qui ont une démarche construite et plannifiée sur ces sujets. Ils se forment « à la volée », y consacrent ça et là un peu de lecture, assistent de temps à autre à un atelier ou une conférence. L’inconvénient de cette méthode est que ces sessions sont les premières variables d’ajustement quand l’agenda se resserre. Au lieu de protéger ces espaces de réflexion et de développement personnel, c’est la première chose qu’on annule quand les imprévus surgissent. Et les imprévus, malheureusement, il y en a toute la semaine.
Dernière explication possible : les chefs d’entreprise seraient-ils des êtres naturellement surdoués qui ont déjà tout compris à la gestion du temps ? Maîtriseraient-ils déjà tous le télé-travail (le vrai, pas celui consistant à travailler 7 jours sur 7 en amenant des montagnes de dossiers à la maison) ? Auraient-ils un sens inné de l’équilibre vie personnelle et vie professionnelle ?
Il me semble pourtant rencontrer en très grand nombre des hommes et femmes chefs d’entreprise ne sachant plus où donner de la tête. Des gens qui passent 12h par jour au bureau sans lever la tête du guidon. Des entrepreneurs qui souffrent largement d’une vie professionnelle qui les accapare au point de reléguer leur vie personnelle au second plan. Il n’y a qu’à interroger leurs conjoints ou leurs enfants pour se rendre compte qu’un très grand nombre font le constat d’un papa ou d’une maman chef d’entreprise aux abonnés absents, qui a rarement un temps de qualité à leur consacrer.
« Un problème, moi ? Jamais. »
Il est donc plus probable que beaucoup de chefs d’entreprise n’ont pas conscience d’avoir un problème de gestion du temps ou d’équilibre vie personnelle et vie professionnelle.
D’autres en ont conscience, mais n’imaginent sans doute pas trouver des solutions sur le web. Peut-être n’imaginent-ils pas en trouver où que ce soit.
En réalité, beaucoup ont complètement entériné une certaine fatalité : il serait devenu absolument normal quand on est chef d’entreprise, d’être complètement débordé en permanence, de passer sa vie au bureau et de zapper sa vie personnelle.
Un sondage Opinionway de septembre 2017 pour Le Figaro ne disait d’ailleurs pas autre chose : 74% des entrepreneurs y déclaraient que la création d’entreprise est incompatible avec une vie de famille.
C’est un mécanisme très puissant : du moment que l’on accepte cet état de fait comme étant « normal », il n’y a plus la moindre recherche de solution. On est ainsi assuré de n’en trouver aucune. Et ne dit-on pas que s’il n’y a pas de solution c’est qu’il n’y a pas de problème ? La boucle de l’absurde est bouclée.
Le chef d’entreprise super-héros et la pression sociale
Pire, chercher des solutions serait anormal, le signe d’une faiblesse, la preuve que l’on n’est pas taillé pour ce métier.
Dans les rassemblements de chefs d’entreprise, d’ailleurs, combien se plaisent à rouler des mécaniques en narrant leurs agendas surbookés ou leurs 300 mails quotidiens ? Jaugeant son voisin du coin de l’oeil, chacun est enclin à se trouver rassuré de ne pas être le seul… tout en entérinant encore un peu plus que ça doit être normal. D’ailleurs quand on sollicite auprès d’eux un rendez-vous, ne leur sussure-t-on pas « vous devez être très pris » ?
Les mots ont un sens conscient et inconscient.
« Vous devez être très pris » = vous êtes certainement très pris.
« Vous devez être très pris » = en tant que chef d’entreprise, il est de votre devoir d’être très pris, il ne serait pas acceptable que vous ne le soyiez pas. Ce serait même louche. D’ailleurs celui qui a tout son temps ne s’en vante surtout pas ! Comme si ça ne faisait pas sérieux. Mieux vaut encore admettre publiquement qu’on n’arrive pas à se verser de salaire, que reconnaître qu’on a du temps devant soi.
Et le leadership dans tout ça ?
On peut même s’attarder sur « être très pris » : pris au piège. On remarque la forme passive. On est pris par quelque chose. On subit. Comme si ça ne dépendait pas de nous. On se veut décideuse, on se rêve meneur d’hommes, on parle de leadership à longueur de LinkedIn, mais « on est très pris ». Il y a là au minimum un paradoxe à éclaircir.
Voilà qui ne me facilite pas la tâche, en tout cas : il s’agit d’amener du contenu à des gens qui estiment majoritairement ne pas en avoir besoin, et dont beaucoup préfèreraient se faire tuer sur place qu’admettre le contraire.
Qu’à cela ne tienne ! On procèdera par petites touches, en lançant ici ou là quelques pistes de réflexion, pour que l’intérêt des uns et des autres remonte par capillarité. Je ne suis pas pressé. Oserai-je même dire que j’ai tout mon temps ?
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