Podcast Ep 5 – Le syndrome de l’imposteur chez le chef d’entreprise

Le syndrome de l'imposteur chez le chef d'entreprise

par Nicolas Nolf | Boss Autrement

Dans ce podcast on aborde le Syndrome de l’imposteur chez le chef d’entreprise. Certes c’est typiquement un phénomène psychologique. Le problème est que s’il commence dans la tête, le syndrome de l’imposteur a des répercussions négatives très concrètes notamment chez les jeunes entrepreneurs.

Retrouve également sur le blog l’article sur Le Syndrome de l’imposteur chez le chef d’entreprise.

Le syndrome de l’imposteur chez le chef d’entreprise

Le syndrome de l’imposteur chez le chef d’entreprise

(Si tu préfères écouter cet article en podcast, c’est par ici)

Le syndrome de l’imposteur : concrètement, c’est quoi ?

Le syndrome de l’imposteur guette tout jeune chef d’entreprise et se manifeste généralement très vite.

Te voilà officiellement chef d’entreprise. Les statuts sont déposés, ton site web est en ligne, des cartes de visite toutes neuves viennent d’arriver, le marquage de ton véhicule est terminé, les premiers articles de presse locale sont en train de sortir… bravo !

C’est le temps de l’adrénaline des débuts. Ton entourage n’est pas en reste. Ta famille, tes amis, moitié encourageants, moitié taquins : « Alors, ça y est ? Tu t’es lancé ? C’est le grand saut ? Monsieur le Directeur ! Madame la Présidente ! »

Tu adhères peut-être à l’association professionnelle nationale, ou celle du coin. Tu commences à fréquenter leurs rassemblements, petits déjeuners, cocktails, etc. Te voilà aussi peut-être dans un ou deux réseaux de business, ça ne peut pas faire de mal.

Au fil des semaines il est possible qu’un sentiment un peu indéfinissable commence à t’envahir.

En discutant avec tous ces professionnels, en les écoutant parler, tu es peut-être un peu partagé. Celui-ci est dans sa dixième année d’existence et affiche 40 salariés. Celle-là raconte le chemin de croix du dernier marché public qu’elle a vaillamment remporté. Une autre égrène au coin d’une phrase les noms prestigieux de quelques-uns de ses clients.

Ton premier sentiment est l’admiration. C’est pour suivre les traces de ces chefs d’entreprise que tu as voulu te lancer. Leur réussite est une source d’inspiration et de motivation. C’est notamment pour ces retours d’expérience que tu fréquentes ces rassemblements.

Mais dans le même temps, tu as déjà pu commencer à mesurer la difficulté de « percer »… les premières pistes que tu croyais avoir n’ont rien donné, tu t’es rendu compte que beaucoup de prospects ont déjà leurs habitudes avec des concurrents beaucoup plus « installés », et que tu es face à des sociétés affichant une ancienneté et des références clients sans aucune commune mesure avec toi qui viens de démarrer.

Alors un deuxième sentiment s’installe, et il est alimenté par une dose croissante de doute.

Ce sentiment, c’est le syndrome de l’imposteur. Cela signifie tout simplement avoir du mal à se sentir légitime dans son métier et son activité les premiers temps.

Doute sur le bienfondé de ta création d’entreprise, doute sur ton étude de marché, sur le temps que les choses vont mettre à se concrétiser… et donc doute sur ton prévisionnel, sur ton financement, et sur la viabilité de ta jeune entreprise.

Et fort logiquement, par conséquent : doute sur toi-même. Au fil des mois quand la curiosité de ton entourage se fait plus pressante, tu es de moins en moins à l’aise : « Alors, ça en est où ? Tu avances bien ? Tu es content ? Pas trop dur ? »

Ce doute est peut-être renforcé par ta jeunesse : pour peu que tu sois fraîchement diplômé, tu n’as pas 20 ans d’expérience dans ton domaine. Tu n’as pas le réseau professionnel d’un vieux briscard. Tu as peut-être tout simplement l’air bien jeune, aussi. Tu as pleinement conscience d’être en train de vendre ton expertise à des prospects qui ont l’âge d’être tes parents. Ils en ont sans doute conscience aussi. Quand ils te disent « J’ai intégré cette boîte en 1991 », tu ne peux t’empêcher de remarquer qu’en 1991, tu n’étais pas né.

Et dans le regard de tes interlocuteurs, quand tu déballes ton « elevator pitch » soigneusement préparé pour répondre en 10 secondes à la fameuse question « Et toi, tu fais quoi ? », il te semble lire parfois un air gentiment amusé.

Tu t’entends penser « Je ne suis pas crédible, je n’ai encore rien fait, je n’ai pas encore facturé un euro. Je vis encore chez mes parents et je bosse dans ma chambre. Avec mon associée qui a 23 ans comme moi on a dormi chez ma tante pour assister au dernier Salon sans payer l’hôtel. »

Tu t’entends le penser si fort que tu te demandes même si ton interlocuteur ne l’a pas entendu aussi. La bande-son de ce sentiment ressemble un peu à cette chanson d’Alain Souchon :

Syndrome de l’imposteur : un sentiment normal

Je suis là pour te dire que c’est un sentiment qu’il est normal de ressentir. La plupart des jeunes chefs d’entreprise ont le syndrome de l’imposteur.

A des degrés divers, certes. On n’est pas tous complètement égaux face au syndrome de l’imposteur, car c’est aussi selon l’estime de soi qu’on a au départ, la dose de confiance en soi, la propension à douter ou au contraire, à une certaine insouciance.

C’est souvent plus dur pour les « premiers de la classe » parce qu’ils gambergent plus que la moyenne, ils veulent briller, ils y sont habitués. Tout récemment avant de se lancer, ils avaient ce « statut » parmi leurs camarades. Tout d’un coup, une fois dans le grand bain du marché, ils n’ont plus de statut. Avoir été major de promo ou avoir eu « mention Très Bien » ne veut plus rien dire quand on crée son entreprise.

La pression de l’entourage est encore plus forte pour eux car les proches ont aussi eu l’habitude de les voir briller et beaucoup ne se rendent pas compte que tous les compteurs sont remis à zéro quand on crée l’entreprise : « Je suis sûr que ça cartonne pour toi ! » Et comme on ne veut pas inquiéter ses proches, on répond par un rire embarrassé et on change vite de sujet. Et ils resteront persuadés que « ça cartonne »… ce qui aura pour conséquence qu’on va continuer de garder ses doutes pour soi.

Car en parler, c’est dur. En parler à qui, déjà ?

A ses proches ? On craint de les inquiéter et de les décevoir, premièrement. Quand Pépé dit « Je suis sûr que ça cartonne ! » l’oeil brillant de fierté pour la « réussite professionnelle » de son petit-fils, on ne va quand même pas lui dire « J’en bave comme jamais, je ne facturerai pas un euro avant un an, je n’aurais jamais dû faire ça. »

Pour peu que dans l’entourage il y ait eu des sceptiques dès les premières étapes de ton projet, tu ne veux surtout pas non plus avoir droit au : « Je te l’avais bien dit, tu n’as pas voulu m’écouter ! Faut pas venir te plaindre maintenant ! » C’est le dernier truc que tu as envie d’entendre.

Sans parler du classique « Non mais écoute-le, il est patron et il se plaint ! Tu ne veux pas que je pleure, aussi ? » C’est fou le nombre de gens qui s’imaginent que du moment qu’on est « patron » l’argent coule à flot et on a automatiquement la belle vie. A se demander pourquoi tout le monde ne monte pas sa boîte, finalement.

Et en parler… pour en dire quoi ?

On ne veut pas avoir l’air de se plaindre. On se trouve un peu ridicule d’éprouver ce sentiment, car effectivement, on s’attendait à quoi ? A ce que le marché se précipite à notre porte pour nous passer des commandes dès la première semaine, sous prétexte qu’on a lancé son site web et fait floquer une parka ? On éprouve un sentiment de naïveté, et on n’en est pas fier.

Et puis on se dit que c’est pas pro de se lamenter. On est patron, bon sang. Le fameux entrepreneur risque-tout, aux nerfs d’acier. Celui qui se jette d’une falaise et construit un avion sur le chemin de la descente. Même pas peur. Pas nous. Pas le droit.

N’empêche, le syndrome de l’imposteur est bien là, avec son terrible cortège de doutes inexprimés.

Le syndrome de l’imposteur : des conséquences qui ne sont pas seulement dans la tête

Bah, ce n’est pas bien grave, si ? Les doutes finalement, c’est tout dans la tête.

Eh bien pas seulement. Il y a de vrais dangers concrets pour celui qui est dans le syndrome de l’imposteur.

Le principal danger est de mal se vendre. L’elevator pitch peut devenir hésitant et manquer de punch, par excès de modestie.

On peut ressentir le besoin d’y apporter trop de précisions, pour bien montrer sa compétence technique, prouver qu’on connait son sujet et qu’on le travaille en détail. L’interlocuteur est vite perdu, ou saoulé, ou les deux en même temps. Il passe vite à la personne suivante et s’empresse de t’oublier.

C’est quand même plus impactant de dire « Je lance l’iPod. Ce sera 1000 chansons dans votre poche. » que de dire « Je lance un lecteur de musique digitalisée qui aura une capacité mémoire de 5 Go et qui permettra de stocker jusqu’à mille fichiers comme par exemple de la musique, ça mesure à peu près 8 cm de long et 4 cm de large, et on peut l’emmener facilement avec soi dans une poche ou dans un sac ou dans sa boîte à gants. J’y arrive parce que j’ai trouvé le moyen de miniaturiser tel composant avec l’aide d’un partenaire industriel à Singapour, parce que jusqu’à présent c’était tel standard qui était utilisé par les industriels mais maintenant on peut avoir accès à tel nouveau truc et donc etc etc »

Un autre danger est de ne pas facturer assez cher sa prestation, ou accepter des conditions commerciales atroces comme des remises énormes, des garanties invraisemblables ou des délais de paiement insupportables. Bref, c’est un coup à passer pour un entrepreneur désespéré, prêt à tout et donc vulnérable. (A ce sujet tu trouveras en bas de cet article le lien pour obtenir gratuitement l’E-doc « Les 3 erreurs fatales des (jeunes) chefs d’entreprise« )

Le management n’est pas épargné non plus. On voit beaucoup de jeunes chefs d’entreprise passer à côté du management de leur équipe, parce qu’ils éprouvent ce sentiment d’illégitimité. Ils adoptent un management flottant, hésitant, et transmettent à leur équipe ce sentiment de ne pas bien savoir où l’on va et de ne pas oser s’affirmer. Le doute est contagieux. D’autant que le management s’apprend difficilement à l’école.

Le syndrome de l’imposteur est aussi appelé syndrome de l’autodidacte, car nombreux sont les autodidactes qui traînent très longtemps, parfois éternellement, une sorte de complexe d’infériorité par rapport à ceux qui sont bardés de diplômes.

On démarre souvent d’une expertise technique, une expertise métier : ingénieur de formation, on invente tel procédé et on décide de créer l’entreprise pour le développer et le commercialiser. Informaticien, on invente une application et on crée l’entreprise pour la mettre sur la marché.

Mais rares sont les entrepreneurs diplômés en management. On apprend le plus souvent sur le tas. Donc au début on endosse un costume encore souvent trop grand pour soi. Recadrer un client trop long dans ses paiements, on n’ose pas. Négocier âprement les tarifs auprès d’un fournisseur, on ne s’en sent pas toujours capable non plus au début. Idem avec les collaborateurs : on ne se sent pas à l’aise dans ses recadrages, on cherche ses mots, ou alors on commet des actes d’autorité gratuite et exagérée. On se sent ridicule juste après.

On devient chef d’entreprise d’une minute à l’autre en déposant les statuts d’une société au greffe. Mais l’aplomb, la confiance en soi et l’autorité projetée qui doivent aller avec sont souvent beaucoup plus longs à venir.

Le syndrome de l’imposteur : comment en sortir ?

La prise de conscience est déjà 80% de la solution. Toi qui viens de lire cet article, tu sais maintenant plusieurs choses :

  1. comment se nomme ce sentiment
  2. par quels mécanismes il se met en place
  3. que ce sentiment est complètement normal et très répandu
  4. que tu n’es donc ni le premier, ni le seul à l’éprouver.

Tu peux donc désormais le prendre comme n’importe quelle autre composante de ta situation de jeune entrepreneur. C’est comme le fait de ne pas encore être connu. Comme le fait de devoir encore affiner ton offre. Comme le fait de devoir encore mieux définir ta cible. Ce sentiment devient donc comme n’importe quoi d’autre. Il fait partie du paysage.

Le meilleur remède que j’ai trouvé à ce sentiment est d’interroger les autres au sujet de leur parcours. Discuter avec d’autres jeunes chefs d’entreprise, déjà, permet de confirmer que « ça le fait à tout le monde ». On en parle avec d’autres dans la même situation (ils le sont pratiquement tous !), on dégonfle le truc, on en rit.

Discuter aussi avec des gens plus expérimentés. Ces personnes qui nous impressionnent par leur maîtrise, leur expérience. Derrière chacun de ces succès il y a une histoire de doutes, de remises en question, de vaches maigres, mais aussi d’un peu de culot, d’un peu de bluff… et donc de beaucoup de courage et de ténacité. Et même une main tendue pour te donner ce petit coup de pouce, parfois.

Tu trouveras ces opportunités d’en parler avec d’autres dans des structures comme Réseau Entreprendre, les ruches d’entreprises, le club entrepreneuriat de ton école, etc. Et même sur ce blog ! Ne reste surtout pas seul à gamberger. Et dis-toi aussi que ton témoignage sera aussi utile à d’autres dans la même situation. Il suffit de libérer la parole.

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Podcast – Ep4 – Peut-on devenir manager bienveillant ?

Peut-on devenir manager bienveillant? Ou quand on est con, on est con ?

par Nicolas Nolf | Boss Autrement

Le manager bienveillant a la cote, en ce moment. Mais certains affirment qu’on est avant tout une personne bienveillante ou pas. Et que partant de là, on ne transforme pas un « con » en manager bienveillant. Dans ce podcast, on creuse la question…

Tu retrouveras toutes les notes à ce sujet dans l’article Manager bienveillant : peut-on le devenir ? Ou quand on est, on est con ?

Manager bienveillant : peut-on le devenir ? Ou quand on est con, on est con ?

Manager bienveillant : peut-on le devenir ? Ou quand on est con, on est con ?

Le manager bienveillant, à la mode ?

Le « manager bienveillant » est le sujet de milliers d’articles et fils de discussion sur LinkedIn et ailleurs, depuis quelques années.

Assorti de schémas, de citations, de tableaux comparatifs entre manager bienveillant et… autre.

Le tout est maintenant assorti de formations, de livres, de séminaires et de consultants en management bienveillant.

D’ici peu on verra apparaître « manager bienveillant » dans les intitulés ou descriptifs de poste des uns et des autres, ou dans les offres d’emploi. Il faudra sans doute prochainement que les candidats à des postes de management se revendiquent clairement de la mouvance du manager bienveillant pour décrocher le poste. C’est peut-être déjà le cas ? On devrait créer un signe distinctif pour les reconnaître. Un chapeau à plumes, ou une chasuble ? Histoire d’être sûr.

Parce que pour le coup si l’on pense avoir affaire à un manager bienveillant et que ça n’est pas le cas, la chute peut-être rude.

Peut-on devenir un manager bienveillant ? Les partisans du non

Allez, soyons un peu sérieux et revenons à ce qui nous occupe beaucoup sur ce blog : la question du développement personnel sous-jacente à cette notion de manager bienveillant. On voit fleurir tellement de formations, conférences, séminaires et livres sur le sujet. Peut-on devenir un manager bienveillant ?

Beaucoup sont catégoriques, la réponse est non. Pour les partisans du non, soit on est un individu bienveillant à la base, soit on ne l’est pas. Le conférencier Michael Aguilar faisait récemment une sortie remarquée à ce sujet sur LinkedIn. On est quelqu’un de bien, ou pas. On est élevé dans le respect des autres, dans l’écoute, dans l’idée qu’on ne doit pas infliger à autrui ce que l’on n’aimerait pas subir… ou pas. A partir de là, tout est dit.

Quand dans sa vie perso on est quelqu’un de bien, et que dans la vie pro on est manager, on est sans doute un manager bienveillant.

Inversement, quand à la base on est un sale type ou une harpie, il n’y a pas de miracle… donc aucune raison qu’on soit un manager bienveillant au boulot.

Simple, non ?

Une fois qu’on a dit ça, on peut bien sûr remballer toutes les formations, conférences, tous les livres et autres consultants en management bienveillant. Il ne reste plus qu’à sortir sa guitare et chanter en choeur avec Brassens :

 

L’intelligence émotionnelle, c’est pas fait pour les chiens

C’est un peu plus complexe que cela, en fait.

Car en remballant tout ça, on abandonne aussi toute conviction que les gens peuvent changer de comportement, qu’on peut leur faire prendre conscience de l’impact qu’ils ont sur les autres, et qu’ils peuvent progresser dans leur pratique.

Un peu triste, non ?

Penser qu’il est impossible de devenir un manager bienveillant, c’est faire table rase de l’intelligence émotionnelle des individus.
La première composante de l’intelligence émotionnelle est la conscience de soi : les émotions que l’on ressent, son humeur. En somme, le déni de conscience de soi revient à réduire les « cons » à une sorte d’état animal. C’est sans doute pour ça qu’on dit d’un con qu’il est bête. Mais là encore, ce n’est pas aussi simple que ça.

On est toujours le con de quelqu’un

Doté d’une intelligence émotionnelle minime, le con serait donc celui qui ne tient pas compte des émotions des autres, de leur personnalité, et qui s’exprime donc sans nuances, sans même se rendre compte de ses propres biais.

Hmmm… tu es bien certain que ça ne t’est jamais arrivé ? Emettre un avis tranché, avec des mots forts et catégoriques, sans te soucier plus que ça du vécu de ton interlocuteur, sans imaginer qu’il puisse avoir un avis différent pour des raisons peut-être aussi valables que les tiennes ?

Personnellement ça m’est arrivé un paquet de fois et ça m’arrive encore régulièrement. Je suis certainement le con de pas mal de gens. Peut-être même suis-je le tien.

Pourtant il m’arrive aussi régulièrement, quand même, d’être plus doué dans mes relations interper-personnelles. De comprendre les gens, d’arriver à me mettre un peu à leur place, de saisir par quel raisonnement ils sont arrivés à leur conviction, tout ça.

Donc cette définition du con et l’étiquetage qui va avec ne semblent pas être une mesure valable pour estimer que tel manager serait définitivement incapable de la moindre bienveillance. Ou alors, il ne s’agit pas d’être con, au sens « un vrai con », mais de se conduire comme un con, ce qui est déjà tout différent. Et ça c’est à la portée… du premier con venu. Donc à la portée de tous, y compris des gens qui s’estiment irréprochables.

L’intelligence émotionnelle, le socle du manager bienveillant

La voie d’accès à davantage de bienveillance semble tout simplement se trouver dans le développement de l’intelligence émotionnelle. Notamment dans sa fameuse première composante qui est la conscience de soi.

Par exemple, en débriefant une situation concrète dans laquelle on a pris le temps de noter les paroles exactes des uns et des autres, on peut très facilement amener un manager à prendre davantage conscience de ses choix de vocabulaire, et à réfléchir sur l’impact que ce vocabulaire a pu avoir sur la personne en face.

Il existe plein de methodes pour progresser, et nous en évoquerons plusieurs sur ce site au fil des semaines.

On se rend très vite compte qu’il y a beaucoup moins de vrais cons, en réalité, que de gens dont les paroles dépassent la pensée, ou dont la parole est fruste, ou qui ont parlé sous le coup d’une émotion ou d’une humeur, et qui ne se sont pas bien rendu compte de la portée de leurs mots. Certes c’est un problème quand on est manager et qu’on est amené à cadrer, encadrer et recadrer régulièrement. Mais ça se travaille !

Bien sûr, certains individus sont naturellement plus doués dans cet exercice. D’autres partent de plus loin.

Manager bienveillant : une qualité acquise plutôt qu’innée

Le vécu professionnel joue beaucoup. Par exemple, quand on a été « bien managé », on part de moins loin au moment de manager à son tour puisqu’on aura tendance à reproduire de bonnes pratiques.
Certains secteurs d’activité sont aussi réputés pour les explications un peu abruptes, la culture de la gueulante et des coups de menton. Il se peut donc qu’un manager issu d’un de ces secteurs reproduise tout simplement le schéma dominant de management dont il a eu l’habitude. Cela constitue un biais supplémentaire dont il faudra lui faire prendre conscience et sur lequel il pourra travailler.

D’autres pensent qu’on laisse ses émotions et sa mauvaise humeur au vestiaire quand on commence sa journée de travail, alors que rien n’est plus faux. C’est souvent le cas chez les managers jeunes encore inexpérimentés. Par conséquent non seulement ces managers ne supporteront pas de devoir gérer des salariés affectés par une émotion ou une humeur personnelle, mais pire, ces managers n’auront absolument pas conscience d’agir et de parler sous l’influence de leurs propres émotions et humeurs.
En leur faisant simplement prendre conscience qu’eux-mêmes ne laissent par leur humeur au vestiaire, on peut très vite les aider à comprendre qu’il en va de même pour les salariés qu’ils encadrent et qu’il faut en tenir compte.

Précisons aussi que des gens très « bien » au demeurant, peuvent avoir beaucoup de mal à adopter une attitude bienveillante dans leur management. Penser que quelqu’un de bien sera naturellement un manager bienveillant est une erreur grossière.
Certains managers pensent devoir jouer une sorte de rôle de composition quand ils sont au boulot. Ils ou elles souhaitent « mettre une barrière » vis-à-vis de leurs collègues et de leurs subordonnés : pour compenser leur jeune âge, leur timidité ou leur manque de confiance en eux, parce qu’ils pensent ainsi se faire mieux respecter, etc. Ils ont 1001 raisons de le faire, et pensent parfois y parvenir en adoptant un ton cassant, une attitude distante ou autoritaire.

Es-tu certain(e) d’être toujours irréprochable dans ta façon de manager ? N’as-tu rien appris au fil de ta carrière (peu importe sa longueur) ? Avant d’être chef d’entreprise, n’as-tu croisé aucun manager qui a cru en toi malgré tes travers, et qui t’a montré ici ou là que tu pouvais améliorer ta pratique ?

N’arrêtons jamais de penser que les gens peuvent changer de comportement. Et je dis bien « changer de comportement » et pas « changer » tout court. Car la clé est de commencer par dissocier la personne de son comportement. Heureusement que nous ne sommes pas réductibles à nos façons de nous comporter ! A moins d’être un saint nous serions tous des individus assez exécrables.

Et de temps en temps, oui, ça arrive : on croise un con, un vrai. Indécrottable. Hermétique à toute tentative d’amélioration.

Prière, simplement, de ne pas cesser de croire en la capacité de progression de la plupart de nos salariés au motif qu’il y aurait des cons dans le lot. On dit souvent que la bêtise est la chose la mieux partagée au monde. Il y a donc, quoi qu’on fasse, des cons dans tous les métiers et à tous les postes, y compris les plus hauts.

Qu’il s’agisse de les changer en parfait modèle du manager bienveillant, ou simplement de s’améliorer tout au long de la vie, ne cessons jamais de miser sur les autres.