Avoir une bonne équipe, c’est quoi ?
L’état d’esprit dans lequel on se trouve par rapport à notre équipe est parfois plus important que la qualité de l’équipe elle-même. Avoir une bonne équipe, ce serait tout dans la tête ?
En tout cas, prendre du recul à ce sujet est primordial pour espérer ensuite agir concrètement.
Tu le sais si tu as écouté mes premiers podcasts ou si tu as consulté la page « A propos » de ce site que mon entreprise a évolué depuis sa création pour passer de 1 personne à 11 personnes aujourd’hui.
Depuis juillet 2017, j’habite la plupart du temps à 2000 km de mon équipe et l’essentiel de notre collaboration se fait à distance. Toute mon équipe télétravaille au moins une journée par semaine quel que soit le poste occupé.
Quand je parle avec d’autres entrepreneurs du développement qu’a connu mon entreprise ces dernières années, ou de la manière dont l’équipe fonctionne aujourd’hui, avec beaucoup d’autonomie, une belle coordination, une motivation forte, souvent à distance, il arrive souvent de m’entendre rétorquer « Oui mais toi, tu as une bonne équipe ».
Le plus souvent, je suis face à quelqu’un qui éprouve des difficultés de management : problèmes d’organisation de l’équipe, de confiance, de micro-management, de motivation, etc.
Je suppose que beaucoup de chefs d’entreprise aimeraient améliorer ces différents points. Je suis donc toujours interpellé par cette réaction un peu « fourre-tout » qui l’air de rien, instille une bonne dose de défaitisme dans l’esprit de celui qui la prononce.
Et peut-être que toi aussi, quand tu discutes avec des confrères qui ont réglé des points qui te posent toujours problème, tu es tenté d’adopter cette réaction « oui mais toi, tu as une bonne équipe » ?
Si je voulais te provoquer je te dirais qu’on a l’équipe qu’on mérite… mais ce n’est pas si simple. On a surtout l’équipe qui va avec le temps qu’on consacre à y réfléchir. On a l’équipe qui va avec la cohérence qu’on met entre ses pensées et ses actions.
Avoir une bonne équipe : une question de recrutement ?
Au premier degré, la réaction « oui mais toi tu as une bonne équipe » fait référence à un problème de recrutement.
Bien sûr, c’est le premier facteur auquel on pense.
Si on recrute bien, c’est mieux.
Si on recrute mal, ça ne va pas.
Mais une fois qu’on a dit ça, ça voudrait dire qu’il suffirait de bien recruter pour que tout se passe bien.
Or, ça n’est pas le cas : les exemples ne manquent pas dans lesquels on a assemblé au départ une bonne équipe constituée de bons éléments, qui vont ensuite se démobiliser et s’en aller les uns après les autres.
Et puis si l’on accepte cette idée qu’il suffit de bien recruter, cela veut dire que si la boîte rencontre des difficultés c’est systématiquement parce qu’on a une mauvaise équipe mal recrutée.
L’équipe devient alors la source de tous les maux et on a tendance à balayer d’un revers de main toutes les autres questions importantes : la stratégie commerciale, la pertinence des produits, le business model, le financement de l’activité, et le management au quotidien.
Et puis si l’on estime qu’il suffit de bien recruter, quand on rencontre des difficultés à faire fonctionner l’équipe, on fait quoi ? On les vire tous et on recommence ? Concrètement, c’est difficile.
On en vient à entériner le fait qu’on a une mauvaise équipe, puis à rejeter toutes les fautes dessus. C’est pratique, en fait.
Bien sûr au passage, on s’en veut d’avoir mal recruté,
Mais l’on s’exonère de tout autre levier, comme si tout commençait et s’arrêtait au recrutement.
Je vais te dire une chose : un tiers de mes salariés ont commencé comme stagiaires à 21 ou 22 ans. Heureusement qu’ils ont évolué, progressé, et qu’on a travaillé ensemble sur leurs compétences et leur organisation !
Et donc, comment sortir de cette logique ?
Mettre des mots dessus : l’étape essentielle
La première chose à faire est se poser et mettre des mots dessus.
Qu’est-ce que tu mets derrière ce « oui mais toi, tu as une bonne équipe » ?
Ce que ta remarque me dit en creux, c’est que selon toi ton équipe n’est pas bonne.
Ou au moins qu’elle n’est pas assez bonne pour fonctionner comme la mienne fonctionne, ou selon tes désirs.
Qu’est-ce qui te fait dire que ton équipe n’est « pas bonne » ou « pas assez bonne » ?
On se met à l’écart, on sort du bureau, on se pose face à son carnet et on note tout ce qui nous passe par la tête associé à « mon équipe n’est pas bonne », le plus simplement du monde en complétant la phrase suivante :
« Ce qui me fait dire que mon équipe n’est pas bonne, c’est…«
Et surtout, on déroule du concret !
Quand je dis qu’elle n’est pas bonne, c’est quand par exemple…
La dernière fois que je me suis dit que l’équipe n’était pas bonne, c’était dans cette circonstance précise…
Une circonstance ne fait pas une généralité, mais tu m’as compris : tu dois absolument chercher à repartir d’un exemple précis.
Une fois que tu auras décortiqué une première circonstance ou un premier exemple, il t’en viendra d’autres et ce sera plus facile.
L’important c’est surtout de prendre ce réflexe d’ancrer ta réflexion dans les situations concrètes. Quand tu multiplieras les exemples concrets, tu verras apparaître certains schémas récurrents qui constitueront des généralités… mais ces généralités seront ancrées dans le réel.
Donc, n’hésite pas à décrire la situation en détail. C’est suprêmement important d’aller dans le détail parce que c’est ce qui permettra d’identifier des déclencheurs précis sur lesquels tu pourras agir concrètement.
C’est un conseil que tu retrouveras souvent sur ce site : « sois précis ». C’est la chose la plus importante.
Tant qu’on reste dans un sentiment général qu’on ne rattache pas à quelque chose de tangible, précis, factuel… on a juste de quoi se sentir pas bien, éprouver un malaise général… mais rien pour agir.
Aller dans le détail
Par exemple, j’entends parfois « Dès que j’ai le dos tourné, ils se tournent les pouces. »
Qu’appelles-tu « avoir le dos tourné » ? Un rendez-vous extérieur ? 3 jours de déplacement ? 15 jours de congés ? Ce n’est pas la même chose.
Et « ils se tournent les pouces » : qui se tourne les pouces ? De qui parles-tu en particulier ?
Et qu’appelles-tu « se tourner les pouces » ? Ils ne font rien de la journée par fainéantise ? Ils ne prennent pas de décisions qui débloqueraient certaines situations et se contentent d’attendre ?
Là encore, ce n’est pas la même chose du tout.
Ton analyse ne doit en aucun cas en rester à « Dès que j’ai le dos tourné ils se tournent les pouces »
En creusant un peu, en t’obligeant à décrire des circonstances précises, tu arriveras plutôt à quelque chose du genre :
« Pour mon déplacement sur le salon Machin à San Francisco, je me suis absenté 5 jours. Pendant que j’étais absent, Philippe n’a pas apporté de réponses au client Y au sujet de notre dernière offre commerciale, parce qu’il n’avait pas intégralement pris part à l’élaboration de la proposition tarifaire et ne savait donc pas s’il pouvait revoir le tarif à la baisse ou pas. Il ne m’a pas fait de mail parce qu’il ne savait pas quand je le lirais comme j’étais occupé sur le salon, et il n’a pas osé m’appeler en raison du décalage horaire »
Tu admettras que c’est déjà très différent de « Dès que j’ai le dos tourné ils se tournent les pouces.»
On a là une circonstance précise, le contexte de ton absence, sa durée, un collaborateur identifié qui a rencontré un problème spécifique et n’a pas pu agir pour des raisons précises.
Cette analyse te donne déjà plusieurs pistes fortes pour agir et ne plus rencontrer ce problème à l’avenir :
- Intégrer Philippe à toutes les étapes de la proposition tarifaire puisqu’il doit ensuite se trouver au contact direct avec le client notamment en ton absence.
- Prévoir systématiquement de laisser des consignes spécifiques à l’équipe pour communiquer avec toi en ton absence du bureau : je lirai mes mails une fois le matin et une fois le soir, je serai joignable de 8h30 à 9h30 tous les matins heure française, ou bien « je ne répondrai aux mails qu’à mon retour le », mes mails seront transférés vers X qui prend les décisions en mon absence, etc. Des consignes claires !
- Fixer pourquoi pas un montant d’autorisation à Philippe, en-dessous duquel il n’a pas à te demander d’autorisation.
Avoir une bonne équipe : étonamment simple ?
Ça te paraît bête ? Evident ? Enfoncer des portes ouvertes ? Rappelle toi pourtant combien de fois tu dois bosser avec des prestataires qui en l’absence de Madame Y sont incapables de t’apporter des réponses… c’est bien la preuve que c’est loin d’être aussi évident partout.
J’ai déjà entendu aussi « ils ne suivent pas les process ».
Qui ne suit pas les process ? Quels process exactement ne sont pas suivis ? Tous les process ? Certains process ? Un certain process en particulier ? C’est systématique ou pas ? De quand datent ces process ? De quel contexte ? Qui les a rédigés ?
« Untel joue au petit chef en mon absence » : auprès de qui ? À quel sujet ? Pourquoi les personnes qui subissent son comportement ne trouvent-elles pas la parade ?
Et si tu ne vois rien apparaître de récurrent, c’est justement qu’il s’agit de dysfonctionnements occasionnels, qui peuvent toujours arriver, et qui ne veulent pas dire que d’une manière générale ton équipe est mauvaise. Il y a bien sûr des choses à apprendre de ces dysfonctionnements occasionnels mais cela t’aidera à les traiter comme tels plutôt que de généraliser et de jeter le bébé avec l’eau du bain.
Derrière chacun de ces sujets, tu as plein de réglages à faire, dont la plupart n’ont rien à voir avec ton recrutement.
Tu trouves toujours que ton équipe n’est pas bonne ?
Que fais-tu concrètement pour la rendre meilleure ?
Parfois tout tourne autour d’un sujet précis comme « les réponses aux clients », ou « les délais d’exécution des tâches », ou parfois même ça tourne autour d’une personne ou deux en particulier.
Ca ne veut pas dire que cette personne est bonne à virer… cela peut avant tout signifier que son rôle est mal défini, qu’elle a besoin de plus d’encadrement, de plus de contexte, qu’elle prend en charge des tâches qui sont en dehors de ses compétences, que son domaine d’action chevauche celui d’une autre personne et crée des interférences, etc. Il peut y avoir 1001 raisons et donc 1001 solutions à y apporter.
Allez, un peu de boulot :
- Te poser quelque part et compléter la phrase « La dernière fois que j’ai trouvé que mon équipe n’était pas bonne, c’était… », décrire précisément une situation spécifique et ce qui n’a pas fonctionné. Cela te permettra d’identifier beaucoup plus précisément quelques problèmes.
- Viens lister les problèmes identifiés en commentaire sur mon blog, ou envoie-moi un mail sur nicolas@nicolasnolf.com
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